5 décembre 2025

Non-résidents : peut-on être exonéré des prélèvements sociaux sur les revenus fonciers en France ?

La fiscalité immobilière française appliquée aux non-résidents suscite régulièrement des interrogations, en particulier lorsqu’il s’agit des prélèvements sociaux – CSG, CRDS et prélèvement de solidarité – frappant les revenus fonciers.

L’enjeu n’est pas neutre : les prélèvements sociaux représentent 17,2% du revenu foncier net.

Pour certains non-résidents, il est possible de bénéficier d’un taux réduit de 7,5%.

Il convient toutefois de répondre strictement aux conditions fixées par la législation.

1. Cadre légal : Pourquoi les non-résidents ont-ils été soumis aux prélèvements sociaux ?

1.1. Le basculement opéré en 2012

Jusqu’en 2012, les non-résidents percevant des revenus immobiliers en France n’étaient pas soumis à la CSG et à la CRDS.

La loi de finances rectificative du 16 août 2012 a modifié cette situation en étendant les prélèvements sociaux aux revenus du patrimoine des non-résidents (revenus fonciers, revenus locatifs, plus-values immobilières).

1.2. La contrariété avec le principe d’unicité de la législation sociale en droit européen

Selon le droit de l’Union européenne, une personne ne peut être soumise qu’à la législation d’un seul Etat membre. Ce principe empêche qu’un contribuable affilié à un régime obligatoire de sécurité sociale d’un autre Etat de l’Union européenne soit assujetti à des contributions sociales françaises finançant la sécurité sociale française (règlement européen 883/2004).

C’est sur ce fondement que la réforme de 2012 a été critiquée.

2. Jurisprudence européenne et nationale : la fin de l’assujettissement généralisé

2.1. Les décisions de la Cour de Justice de l’Union Européenne

La CJUE a jugé que la CSG et la CRDS constituent des cotisations sociales en raison de leur affectation à la sécurité sociale française (arrêt De Ruyterde février 2015).

En conséquence, un contribuable déjà affilié à un régime de sécurité sociale d’un autre Etat de l’Union européenne ne peut être soumis à ces mêmes prélèvements en France.

2.2. La position du Conseil d'Etat

Le Conseil d’Etat a confirmé que la CSG et la CRDS ne peuvent s’appliquer aux personnes relevant d’un autre régime européen obligatoire de sécurité sociale (CE, 27 juillet 2015 n°334551).

2.3. La réforme de 2019 : un nouveau cadre légal stabilisé

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit que les non-résidents affiliés à un régime de sécurité sociale d’un Etat UE/EEE/Suisse sont exonérés de CSG et CRDS, mais demeurent soumis au prélèvement de solidarité au taux de 7,5% (art. L.136-6 du Code de la sécurité sociale).

3. En conclusion, qui peut bénéficier de l'exonération ? 

Trois conditions doivent être réunies :

  1. Être non-résident fiscal de France : le contribuable doit être fiscalement domicilié hors de France au sens de l'article 4 B du Code général des impôts ;
  2. Être affilié à un régime de sécurité sociale d'un Etat membre de l'UE, l'EEE ou la Suisse.
  3. Déclarer correctement la situatiion sur la déclaration fiscale : les contribuables concernés doivent renseigner les cases 8SH/8SI de leurs déclarations de revenus. 

La deuxième condition impose :

  • Une affiliation obligatoire (et non volontaire),
  • Une affiliation au titre d'un autre Etat européen,
  • La capacité de justifier cette affiliation en cas de contrôle (exemples : certificats S1 ou A1 délivrés par certains organismes sociaux étrangers).

Dans le cadre d’un arrêt récent daté du 27 novembre 2025 (CAA Paris, n°25PA02625), la Cour Administrative d’Appel de Paris a rappelé la nécessité de constituer un dossier de preuve solide.

4. Comment bénéficier de l'exonération ? 

4.1. A partir de vos déclarations de revenus

Il convient de cocher les cases afférentes à l’exonération (cases 8SH/8SI), de conserver les certificats d’affiliation à un régime obligatoire étranger, vérifier que vos revenus fonciers sont correctement déclarés.

4.2. Sur demande de remboursement

Un non-résident ayant payé à tort la CSG/CRDS peut déposer une réclamation contentieuse dans le délai légal (jusqu’au 31 décembre de la deuxième année suivant le paiement).

Un examen individuel de votre situation est nécessaire.

En effet, il convient de vérifier (i) le caractère obligatoire de votre affiliation, (ii) les justificatifs à adresser à l’Administration fiscale,(iii) la localisation de votre résidence fiscale à l’étranger, (iv) les revenus concernés par votre demande.

5. En résumé

Pour les non-résidents européens, il existe bien une possibilité d’être partiellement exonéré des prélèvements sociaux sur les revenus fonciers, sous réserve de justifier d’une affiliation à un régime obligatoire de sécurité sociale (le taux est ramené de 17,2% à 7,5%).

Toutefois, les conditions doivent être strictement respectées et les justificatifs sont indispensables.

Un accompagnement spécialisé est fortement recommandé.

Notre Cabinet peut vous assister dans :

·       La sécurisation de vos déclarations de revenus,

·       La constitution des justificatifs d’affiliation,

·       Les démarches de remboursement via réclamation contentieuse.

Comment pouvons-nous vous aider ?

Nous vous assistons et vous conseillons dans toutes vos demandes liées au droit fiscal et au droit des sociétés.